Un auteur : Jean Van Hamme
Jean Van Hamme est un des auteurs européens les plus célèbres et certainement l’un de ceux qui vendent le plus d’albums. A l’heure où sa production tend très fortement à diminuer et où l’avenir de ses plus grandes séries reste encore flou, BLAM! vous propose de revenir sur la carrière du scénariste star, en essayant de dresser une liste relativement exhaustive de son travail. Bonne lecture et rendez-vous sur notre forum pour en discuter.



jean van hammeL’homme

Jean Van Hamme est né le 16 janvier 1939 à Bruxelles. Après avoir obtenu plusieurs titres universitaires, il se lance dans une brillante carrière dans le marketing. Si aujourd’hui ses détracteurs remettent en cause sa sincérité artistique, il est bon de rappeler qu’avant de créer les histoires qui ont fait de lui un des auteurs francophones les plus célèbres, Van Hamme a pris l’énorme risque, en 1976, de laisser tomber un poste de fondé de pouvoirs général chez Philips Belgique pour se consacrer entièrement à sa passion : l’écriture.



Les débuts

Alors qu’il travaillait encore dans le milieu des affaires, Van Hamme fait la connaissance de l’artiste peintre Paul Cuvelier, par l’intermédiaire de sa femme. De leur rencontre naîtra en 1968 son premier travail publié: « Epoxy ». L’album marquait à l’époque le retour de Cuvelier sur le devant de la scène BD, alors que sa Série « Corentin » ne semblait plus vraiment le passionner. L’album a tout d’abord été édité par les éditions Eric Losfeld, éditeur proposant essentiellement du matériel pour adulte. Malgré que l’histoire soit au final très moyenne, l’album a toujours suscité de l’intérêt et, après une période de rupture, a sans cesse été réédité par une série de maisons d’édition : Horus en 1977, Marcus en 1981 et Lefrancq en 1997. En 2003, les éditions Le Lombard intègrent l’album dans la collection Signé avec une nouvelle colorisation signée Bertrand Denoulet (« Niklos Koda », « Pin-up »). Par la suite, Van Hamme va participer à toute une série de titres créés par d’autres, ce qui lui a permis de se faire la main sur différents modes de narration. Il scénarise quelques gags de « Modeste et Pompon » et de « Gaston Lagaffe » (ces derniers auraient été largement remodelés par Franquin avant d’être publiés). Pour Cuvelier à nouveau il écrit deux épisodes de « Corentin » (des années plus tard, en 1989, il participera à son adaptation en série animée). En 1969-1970, il signe quelques récits de « Magellan ». En 1974, il reprend « Domino », un personnage créé par Greg et André Chéret. Toujours en 1974, il répond à l’appel de André Beautemps et reprend le scénario de la série « Michael Logan ». Série qui sera annulée suite au décès de son dessinateur.



thorgalL’âge d’or

C’est en 1975 que Van Hamme écrit le scénario de « Histoire sans héros », mis en images par Dany. Le one-shot reçoit le prix Saint-Michel du meilleur scénario réaliste en 1978. Toujours avec Dany, il réalise trois albums d’« Arlequin ». L’événement déterminant dans la carrière de Jean Van Hamme est sa rencontre avec le dessinateur polonais Grzegorz Rosinski. De cette rencontre naîtra le premier album de « Thorgal » en 1977. Initiée comme une série d’héroic-fantasy relativement classique, Van Hamme n’aura de cesse de la faire évoluer en explorant tous les genres narratifs, du fantastique à l’aventure en passant par la science-fiction, tout en gardant une exceptionnelle homogénéité de l’ensemble. Succès autant public que critique, la série a remporté des dizaines de prix. Sa qualité augmente progressivement au fil des tomes pour former une collection jalonnée de perles scénaristiques comme Alinoë ou le cycle du pays Qâ ; elle atteint son paroxysme au tome 19 durant lequel l’ensemble des bases sur lesquelles reposait la série a été bousculé. Cet album aurait constitué une fin idéale même si elle aurait vraisemblablement partagé son public. Le fait est que les auteurs (et bien évidemment l’éditeur) ont décidé de poursuivre. Les tomes suivants iront du moyen (Géants) au franchement pas bon (Le royaume sous le sable). Ce n’est que dernièrement, avec la parution d’un diptyque constitué des albums Le barbare et Kriss de Valnor, que « Thorgal » a retrouvé un peu de sa superbe. Ces deux albums renouent avec les ingrédients qui ont fait de la série une des meilleures du genre : l’aventure, la fantaisie, un scénario très bien ficelé et des personnages inoubliables.



Le cas XIII

xiiiEn 1984, Van Hamme crée « XIII » avec le dessinateur William Vance. Cette série deviendra un des plus grands hits de la bande dessinée francophone et sera traduite dans le monde entier. Pourtant, le concept de l’amnésique impliqué dans les complots du gouvernement n’est absolument pas neuf. De l’aveu de Jean Van Hamme lui-même, le premier tome de « XIII » est (très) fortement inspiré des romans de la « trilogie Bourne » signés Robert Ludlum. Ces livres, dont les deux premiers ont récemment été adaptés au cinéma avec Matt Damon dans le rôle de l’amnésique, racontent en effet les aventures d’un ancien agent secret américain qui perd la mémoire au cours d’une mission. Y a-t-il eu plagiat ? Car avouer après coup ses sources d’inspiration ne rend pas la démarche vertueuse. Le fait est que Van Hamme ne s’est pas contenté de reprendre la trame générale mais est allé jusqu’à transposer certaines scènes presque intégralement (la scène de la banque suisse par exemple). Ceci dit, à partir des tomes suivants, la série acquière son indépendance et son créateur bâtit un édifice solide et passionnant, une excellente série qui, encore une fois, atteint selon moi son paroxysme bien avant la fin (tome 12). Mais à l’instar de « Thorgal », la qualité n’a ensuite eu de cesse de baisser, les tomes se suivant et se ressemblant lamentablement. La fin de « XIII » a été annoncée par Van Hamme et est prévue dans quelques numéros. Espérons qu’il saura donner à sa série une fin digne de ses meilleurs albums.



Van Hamme, machine à succès

L’année de la création de « XIII », Van Hamme scénarise « S.O.S. Bonheur » pour Griffo, albums qui inaugurent l’excellente collection Aire libre des éditions Dupuis. En 1990, il adapte ses propres romans de la série « Largo Winch », toujours aux éditions Dupuis. La série qui raconte l’histoire d’un jeune milliardaire désinvolte en proie aux dures lois des affaires a un succès immédiat (50.000 exemplaires vendus lors du lancement du premier tome) et sera même des années plus tard adaptée en une calamiteuse série télé. Le succès de la série n’a cessé de grandir, comme c’est le cas pour la majorité des séries de l’auteur. Le tome 8 a été tiré en première édition à 270.000 exemplaires ! Dans « Largo Winch », Van Hamme a la possibilité d’utiliser sa connaissance des systèmes économiques mondiaux pour mettre sur pieds un scénario de politique fiction solidement encré dans la réalité. C’est d’ailleurs ce que certains lui reprochent, certains albums étant réellement noyés dans une théorie économique légèrement indigeste. Reste que, encore une fois, les personnages de « Largo Winch » sont très attachants et les histoires extrêmement bien ficelées. En 1992, Van Hamme crée « Les maîtres de l’orge », une saga familiale racontant l’histoire d’une famille de brasseurs belges. Cette excellente série de huit tomes sera également portée à l’écran sous forme d’un téléfilm en trois volets. En 1996, Van Hamme reprend les personnages de « Blake et Mortimer », histoire qui sera prépubliée dans l’hebdomadaire Télérama.



Les romans graphiques

Les problèmes de maintien de la qualité sur les longues séries de Van Hamme peut s’expliquer par certaines déclarations de l’auteur lui-même. En effet, le scénariste a souvent mis l’accent sur son incapacité à se passionner pour un héro éternellement. Une fois lassé d’un personnage ou d’un univers, Van Hamme souhaiterait le laisser pour explorer d’autres mondes. Mais alors pourquoi ne pas conclure ses séries ? Parce qu’une série comme « XIII » ou « Largo Winch » est une assurance précieuse pour un éditeur (et pour un auteur aussi d’ailleurs) et qu’y mettre fin est une décision difficile à prendre. Une des solutions consiste à travailler sur des séries limitées dès le départ (« Les maîtres de l’orge ») ou sur un format roman graphique, exercice dans lequel Van Hamme excelle. Nous avons déjà évoqué « Histoire sans héros », premier one-shot important du scénariste. En 1994, soit vingt ans après cet album, les deux auteurs se retrouvent pour créer un deuxième one-shot, suite directe du premier et intitulé justement « Vingt ans après ». En 1988, Van Hamme retrouve Rosinski le temps d’un roman graphique intitulé « Le grand pouvoir du Chninkel ». Cet album, considéré par le plus grand nombre comme le chef d’œuvre du duo, raconte l’histoire d’une petite créature au destin exceptionnel, sur fond d’aventure, d’érotisme et de fantaisie ; espèce de revisitation fantastique du mythe chrétien de la genèse. Outre un scénario très fin et qui propose plusieurs niveaux de lecture, le dessin de Rosinski est magnifié par le noir et blanc, chaque planche étant un véritable délice pour les yeux. En 2001, les éditions Casterman proposent une version recolorisée en trois albums : un véritable gâchis. En 2000, Van Hamme scénarise « Lune de guerre » pour un autre grand auteur belge : Hermann. L’album, disponible aux éditions Dupuis, raconte l’histoire d’une haine pure mise en scène dans un magistral huis clos ; un malentendu qui tourne au drame lors d’une fête de mariage un peu trop arrosée. En 2001, le scénariste retrouve Rosinski à nouveau pour la création de « Western », un one-shot prenant place dans le Wyoming au milieu du XIXème siècle. Un très bon album à nouveau.



Van Hamme, outil de promotion ?

lady sMalgré une carrière presque sans faute, les travaux récents de Van Hamme ont de quoi laisser perplexe. La série « Wayne Shelton », insipide et sans le moindre intérêt, est déjà passée de ses mains à celles de Cailleteau en moins de trois tomes. « Lady S. », série presque tout aussi insipide et bourrée de poncifs, est promise au même avenir, le nom de l’heureux élu n’étant pas encore connu. Dans le cas de ces deux très récentes séries, le rôle de Van Hamme ne me paraît pas très clair. Est-il utilisé comme catalyseur pour vendre la série lors de ses premiers tomes, et ensuite compter sur l’incapacité du fan à abandonner une série en cours pour être certain que les albums continuent à se vendre ? Etant donné la relative médiocrité de ces deux séries, on peut même se demander s’il en est réellement à l’origine…



L’avenir

Van Hamme a déjà plusieurs fois évoqué la possibilité de quitter le monde de la bande dessinée, ou en tout cas très fortement lâcher du leste. La série « Thorgal » sera reprise par Yves Sente dès le tome 30 à paraître en 2007 (en plus du projet de spin-off concernant Jolan et Louve, ses enfants). D’après l’auteur, « XIII » toucherait à sa fin et l’écart entre deux histoires de « Largo Winch » semble augmenter un peu plus à chaque fois. Mais sera-t-il possible pour un tel boulimique de la narration de s’arrêter comme ça, du jour au lendemain ? Malgré les quelques accrocs jalonnant sa carrière, Van Hamme peut s’enorgueillir d’avoir mis le pied à l’étrier de la BD pour adulte à bon nombre de jeunes lecteurs dont j’ai fait partie. Ma première lecture de l’auteur a été Alinoë, album que j’ai lu en étant vierge de toute aventure de Thorgal. Je m’en souviens comme si c’était hier, je l’ai lu deux fois de suite. Les semaines qui ont suivies, j’ai lavé plus de voitures et tondu plus de pelouses que je ne l’avais fait durant toute mon existence passée, ceci dans le seul but de récolter suffisamment d’argent de poche pour pouvoir me procurer les autres tomes de la série. Et ce sentiment incroyable, ce bonheur après tout très simple de découvrir un monde imaginaire, de rêver sans retenue, et de vouloir faire savoir au monde entier que l’on vient de découvrir un chef d’oeuvre, Van Hamme me l’a procuré à plusieurs reprises. Et dans la mémoire de l’adulte que je suis devenu, c’est une chose inestimable.


Couverture de Western


Couverture du Grand pouvoir du Chninkel (version colorisée)



Couverture de Thorgal 8 Alinoë

Pour plus d'infos...
Les albums de Van Hamme sur BLAM! :
  La chronique de l'album "Le grand pouvoir du Chninkel".
  La chronique de l'album "Thorgal 27 - Le barbare".
  La chronique de l'album "Wayne Shelton 3 - Le contrat".


Dossier réalisé par Odin, septembre 2006.


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